Lettre du jourMédecine: une balle dans le pied
Courrier des lecteurs
Publié aujourd’hui à 08h38Une étudiante en faculté de médecine à l'Université de Saint-Gall.
KEYSTONE
Genève, 24 septembre
Discussion intéressante cet été avec deux jeunes étudiants en médecine qui ont échoué à leur examen de première année pour un, respectivement deux points.
Ce «numerus clausus» à l’issue de la première année a pour but de limiter le nombre des étudiants, sur la base de leurs notes uniquement. On prend en compte leurs capacités en chimie, physique et maths, entre autres, sans tenir compte de leurs capacités humaines et empathiques, sans considérer non plus leur savoir être, toutes qualités indispensables pour devenir un bon médecin à l’écoute de ses futurs patients.
Les deux jeunes gens dont je parle ont effectué, durant leur collège, de nombreux travaux d’été au sein d’institutions médicales et d’EMS, tâches difficiles, demandant une patience infinie et une disponibilité sans faille. Leurs employeurs respectifs ont tous loué leurs qualités humaines et leurs capacités d’adaptation, ainsi que leur empathie.
«Si nous ne faisons pas un effort massif de formation dans le secteur de la santé, les manques de professionnels vont être criants ces prochaines années.»
Refoulés à l’issue de leur première année de médecine, ils s’en vont poursuivre leur parcours académique… en Belgique! Et lorsqu’ils auront terminé ce cursus à Bruxelles ou à Liège, personne ne peut assurer qu’ils reviendront en Suisse.
Parallèlement, comme nous allons manquer drastiquement ces prochaines années de médecins, en particulier de généralistes, pédiatres, gynécologues, rhumatologues et j’en passe, nous allons faire venir des médecins européens, provoquant une déforestation médicale dans les pays qui nous entourent, comme nous l’avons déjà fait dans les domaines médical et paramédical dans l’Ain et dans le Pays de Gex.
Nouveauté toutefois: un étudiant qui échoue à son premier examen pourra se représenter, sept ans plus tard… D’où vient ce délai et à quelle réalité correspond-il? Je ne le sais pas, mais je me demande bien combien de candidats refoulés attendront durant sept années, période pendant laquelle ils auront certainement trouvé une autre voie, peut-être plus intéressante et leur permettant de se réaliser pleinement sur le plan professionnel, au détriment toutefois de la qualité de la médecine que nous souhaitons tous et toutes.
Nous avons en Suisse un retard important, dû à un manque d’anticipation, dans les domaines des infrastructures et du logement en particulier. Si nous ne faisons pas un effort massif de formation dans le secteur de la santé, les manques de professionnels vont être criants ces prochaines années, alors même que notre système de soins coûtera encore plus cher.
Jean-Marc Guinchard
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.