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La rédaction: Derniers procès nazis: il n’est jamais trop tard

La rédactionDerniers procès nazis: il n’est jamais trop tard

Faut-il juger les complices de la barbarie, même des dizaines d’années après les faits? L’auteur pense que oui.

OpinionChristophe Bourdoiseau

Publié aujourd’hui à 06h15

L’un des derniers procès nazis de l’histoire, celui de Josef Schütz, un ancien gardien SS âgé aujourd’hui de 101 ans, accusé de complicité d’assassinats dans 3518 cas au camp de Sachsenhausen (nord de Berlin), va reprendre à Brandebourg-sur-la-Havel, lundi 16 mai.

Près de quatre-vingts ans après les faits, ce procès a-t-il encore du sens? Vu l’âge et l’état de santé de l’accusé, il est probable qu’il n’effectuera jamais sa peine. Il pourrait même décéder avant le verdict.

«Un avertissement à tous les despotes de la planète et à leurs valets: vos crimes ne resteront jamais impunis.»

Mais ce procès doit avoir lieu! Il n’est jamais trop tard pour rendre justice dans des affaires d’assassinats. Le retour de la barbarie en Europe, avec les crimes de guerre commis par l’armée russe en Ukraine, nous oblige à rester vigilants et à lancer un avertissement à tous les despotes de la planète et à leurs valets: vos crimes ne resteront jamais impunis.

Josef Schütz a été un rouage de la machine de mort nazie, un complice de la Shoah. Sans lui, l’assassinat de 6 millions de juifs n’aurait pas été possible. Du haut de son mirador, l’accusé ne pouvait pas ignorer ce qui se passait. Il a entendu les cris. Il a vu les exécutions sommaires, les fours crématoires, les expériences sur les enfants et les baraques de la mort où crevaient les malades. Hitler et Himmler n’étaient pas les seuls responsables!

L’autre procès en cours, celui de la «secrétaire de Stutthof», démontre à quel point toutes les «petites mains» des nazis étaient essentielles à cette industrie de la mort. Même si elle n’avait que 18 ans à l’époque, Irmgard Furchner, arrêtée dans sa maison de retraite à 96 ans, a permis le bon fonctionnement du camp en tapant les listes des déportés sur sa machine à écrire. Plus de 10’000 personnes sont mortes pendant ses années de service…

Le «comptable d’Auschwitz» était également un homme sans histoire qui classait minutieusement toutes les devises des déportés qui descendaient des trains arrivant de toute l’Europe. Oskar Gröning, condamné en 2015, avait pourtant plaidé non coupable pour n’avoir fait «que son travail»: envoyer les bordereaux à la centrale SS à Berlin avec la liste des objets volés aux déportés.

Ces procès nous rappellent que les accusés n’étaient pas des délinquants ou des criminels mais de simples artisans, ouvriers ou fonctionnaires «sans histoires». Après la guerre, ils ont exercé leur métier sans jamais commettre de délits ou de crimes… comme Josef Schütz.

Entendre les victimes, une dernière fois

Enfin, les derniers procès nazis sont importants pour entendre une dernière fois les survivants. Marcel Suillerot, par exemple, à qui le commandant SS du camp de Sachsenhausen avait dit, le 25 janvier 1943: «Vous êtes entrés par la porte. Vous en sortirez par la cheminée.» Son récit devant la Cour - et devant des jeunes - a été bouleversant. Il avait besoin de parler.

Les poursuites contre d’anciens nazis, même centenaires, ne sont pas guidées par la vengeance mais par la mémoire et le respect. C’est une manière d’écouter une dernière fois les victimes, reconnaissantes.

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